Panorama des jurisprudences de janvier et février 2011

Dans cet article, une présentation des jurisprudences sélectionnées pour l'intérêt qu'elles présentent pour les employeurs du sport.

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LA CONVOCATION A L'ENTRETIEN PREALABLE PAR CHRONOPOST

La Cour de cassation affirme dans cet arrêt du 08 février 2011 (n° 09-40.027) que la convocation à l'entretien préalable au licenciement par Chronopost est valable.

La lettre de l'article L. 1232-2 du Code du travail prévoit la notification d'une telle convocation par la voie de la lettre recommandée avec accusé de réception (LR/AR) ou bien par remise en main propre contre décharge. La spécificité de ces deux procédés de livraison est d'attester de la date de réception de la lettre par le salarié, de manière à ouvrir sans contestation possible le délai de cinq jours ouvrables dont dispose le salarié pour préparer sa défense.

Ainsi, répondant aux besoins des entreprises et s'adaptant à la pratique, la Haute juridiction donne son aval à l'accomplissement de cette formalité par un système de transport privé rapide, dès lors qu'il permet d'attester de la date de réception de la lettre par le salarié. Ce procédé est susceptible de s'étendre à d'autres types de notifications.


LA VISITE MEDICALE DE REPRISE

Avec cet arrêt du 25 janvier 2011 (n° 09-42.766), la Cour de cassation définit les mesures que l'employeur doit prendre dès lors qu'il est informé par un salarié de son classement en invalidité deuxième catégorie.

La décision d'un tel classement par le médecin conseil de la Sécurité sociale est réservée aux assurés considérés comme « absolument incapables d'exercer une profession quelconque » (art. L. 341-4 CSS), et ne concerne que l'application de la législation de la Sécurité sociale, de même que l'invalidité est une notion de Sécurité sociale et non pas de droit du travail.

Ainsi, ce classement n'a pas d'incidence sur les obligations de l'employeur qui reste tenu de convoquer le salarié à sa visite de reprise, qui aboutira en cas d'avis d'inaptitude prononcé par le médecin du travail et d'impossibilité de reclassement, à un licenciement.

L'employeur doit donc organiser sans tarder la visite de reprise dès l'instant que "le salarié l'informe de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail". En somme, l'employeur n'est dispensé de convoquer le salarié à la visite de reprise que si celui-ci ne souhaite pas reprendre son activité et qu'il le fait clairement savoir.

Cette solution en soi n'est pas nouvelle. La jurisprudence selon laquelle une visite de reprise s'impose même au salarié classé en invalidité deuxième catégorie est constante (Soc. 28/10/2009, n° 08-43.251, par exemple).

Toutefois, la Haute juridiction affirme explicitement dans cette espèce que le silence du salarié suffit pour que l'employeur ait à prendre, sans délai, l'initiative de l'organisation de la visite. S'ajoute à cela que le seul retard dans la mise en œuvre de la visite cause un préjudice au salarié.

Cette décision est également à mettre en relation avec un autre arrêt récent (Soc. 15/02/2011, n° 09-43.172), avec lequel la Cour de cassation « enfonce le clou » en affirmant, après avoir repris la formule de l'arrêt du 25 janvier 2010, que le fait de ne pas convoquer à la visite de reprise le salarié classé en invalidité deuxième catégorie est constitutif d'une faute.

Dans cette affaire, le salarié ayant reproché à son employeur de ne pas avoir organisé la visite de reprise, obtient la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur. L'inaction de l'employeur est donc fautive et justifie l'octroi de dommages et intérêts au salarié, ainsi que la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur (par la résiliation judiciaire ou la prise d'acte).

Ces solutions appellent donc à la vigilance de la part de l'employeur, qui doit procéder le plus rapidement possible à l'organisation de la visite de reprise des salariés classés en invalidité deuxième catégorie et dont le contrat de travail est suspendu.


LE DEVENIR DU LOGEMENT DE FONCTION EN CAS DE MALADIE

Par un arrêt du 26 janvier 2011 (n°09-43.193), la Cour de cassation a formellement exprimé sa position quant au devenir du logement de fonction en cas de maladie du salarié qui en bénéficie.

Ainsi, elle affirme que « le logement attribué à titre gratuit à un salarié pour l'exercice de ses fonctions, qui est l'accessoire du contrat de travail et dont il bénéficie dans sa vie personnelle ne peut lui être retiré ou donner lieu au versement d'un loyer, pendant une période de suspension du contrat pour maladie ».

Cette position semble toutefois être nuancée, dans la mesure où la Cour laisse entendre ensuite que l'occupation du logement de fonction alors que les permanences et astreintes n'étaient pas exécutées pourrait donner lieu au paiement d'un loyer et des charges locatives, si une telle clause était prévue au contrat de travail ou résultait des stipulations d'un accord collectif.

Si cette solution semble être transposable aux autres avantages en nature, et notamment au véhicule de fonction (Soc. 24/03/2010, n°08-43.996), il est relativement incertain qu'elle s'applique à tous les types de suspension du contrat de travail. En effet, dans l'hypothèse d'un congé pour création d'entreprise, la Cour avait pris la position inverse (Soc. 19/02/1997, n°94-44.228).


CONSEQUENCES DE LA NON INVITATION DES SYNDICATS A NEGOCIER LE PROTOCOLE PREELECTORAL

Suite à la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale, l'employeur a l'obligation d'informer de la tenue d'élections professionnelles au sein de l'entreprise et donc d'inviter à la négociation du protocole d'accord préélectoral (PAP), les organisations syndicales (OS) « intéressées » au sens de l'article L. 2314-3 du Code du travail.

Les OS reconnues représentatives dans l'entreprise ou l'établissement, celles y ayant constitué une section syndicale, et celles affiliées à une OS représentative au niveau national et interprofessionnel sont invitées à la négociation du PAP par courrier.

En revanche, pour alléger la tâche de l'employeur consistant dans l'identification de ces OS intéressées et leur invitation, l'article dispose que c'est par voie d'affichage que sont informées et invitées les OS qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l'entreprise ou l'établissement concernés.

L'arrêt du 2 mars 2011 précise les conséquences du défaut d'affichage de l'invitation de négocier. La Cour de cassation affirme que le défaut d'affichage prévu par l'article L. 2314-3 du Code du travail constitue une « irrégularité qui par nature affecte la validité des élections ».
Dès lors, un syndicat remplissant les conditions légales serait fondé à demander la sanction la plus lourde, à savoir l'annulation des élections.

Toutefois, cette solution est à nuancer car les hauts magistrats prévoient des exceptions. En effet, le syndicat informé de la tenue des élections de quelque façon que ce soit, ayant soit participé à la signature du PAP, soit présenté des candidats (il s'agit de conditions alternatives), n'est plus fondé à ce prévaloir de l'irrégularité. Mais ceci est vrai uniquement si le syndicat n'a pas émis de réserves expresses lors de la signature du protocole ou du dépôt de la liste de candidats, auxquels cas il est fondé à se prévaloir de la nullité du scrutin.

Cette précision de la part de la Haute juridiction était attendue, même si une jurisprudence constante, bien qu'antérieure à la loi de 2008, affirmait que le défaut d'invitation d'une organisation syndicale intéressée à la négociation du PAP était une irrégularité qui, par sa nature, entrainait l'annulation des élections (Soc., 1/04/1998, n°96-60433).

La même sanction était déjà retenue en cas de défaut d'envoi du courrier d'invitation (Soc., 28/02/1989, n° 87-60.174). C'est donc sans grande surprise que les juges réaffirment cette position, notamment eu égard aux nouveaux enjeux liés aux élections professionnelles.


RUPTURE CONVENTIONNELLE ET PLAN DE SAUVEGARDE DE L'EMPLOI

La Cour de cassation a rendu sa première décision sur la rupture conventionnelle dans un arrêt du 9 mars dernier (n°10-11.581). Etait en question la prise en compte des ruptures conventionnelles pour la détermination de la procédure à mettre en place lors d'un licenciement économique.

La complexité et la lourdeur de la procédure de licenciement économique croissant avec le nombre de licenciements envisagés (l'apogée étant atteinte lorsqu'il y a licenciement d'au moins 10 salariés sur 30 jours), une unité économique et sociale (UES) avait conclu un certain nombre de ruptures conventionnelles en un laps de temps restreint, pour éviter de franchir ce seuil.

La Cour de cassation répond que « lorsqu'elles ont une cause économique et s'inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l'une des modalités, les ruptures conventionnelles doivent être prises en compte pour déterminer la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel applicable ainsi que les obligations de l'employeur en matière de plan de sauvegarde de l'emploi ».

Un communiqué de la Cour confirme ce que l'on pouvait penser, à savoir que « l'intégration des ruptures conventionnelles dans la procédure de licenciement économique ne remet cependant pas en cause leur qualification et leur régime juridiques propres, non plus qu'elle n'affecte, en soi, leur validité ».

S'il s'agit d'une décision importante de manière générale, son impact restera cantonné aux structures d'une certaine taille, qui sont peu nombreuses dans la branche du sport.

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