Rupture conventionnelle et liberté de consentement

La Cour de cassation précise pour la première fois qu’une rupture conventionnelle peut être valablement conclue immédiatement après l'entretien de négociation et que le défaut d'information du salarié sur son droit à être représenté n'affecte pas sa validité.

Publié le

Mis à jour le


Dans deux arrêts en date du 19 novembre 2014 (Cass. Soc ; 19/11/2014 ; n°13-21.979 et n°13-21.207), la Cour de cassation rappelle que la convention de rupture conventionnelle peut être signée immédiatement après l’entretien de négociation et que le défaut d’information du salarié sur la possibilité de se faire assister au cours de celui-ci n’affecte pas la validité de la rupture.

Pour rappel, la rupture conventionnelle est un dispositif de rupture du contrat de travail à durée indéterminée d’un commun accord des parties, mis en place par la loi du 25 juin 2008 (n°2008-596).

Le législateur n’a pas institué de délai de réflexion entre l’entretien de négociation et la signature de la convention de rupture et n’impose pas non plus à l’employeur d’informer au préalable le salarié de la possibilité de se faire assister au cours de l’entretien. La Cour de cassation n’entend donc pas mettre de telles obligations à la charge de l’employeur.

Dans la première espèce (n°13-21.979), au lendemain de son entretien préalable au licenciement, au cours duquel une rupture conventionnelle avait été proposée, une salariée qui avait déjà fait l’objet de deux avertissements avait signé une rupture conventionnelle, homologuée ensuite par l’autorité administrative. Compte tenu du fait que la rupture conventionnelle soit intervenue malgré l’existence d’un différend entre les parties et  à défaut du respect du délai d’une journée entre l’entretien préalable et la signature de la convention de rupture, la salariée contestait la validité de sa rupture conventionnelle.

A la lumière de l’article L1237-12 du Code du travail selon lequel « les parties conviennent de la rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens », la juridiction prud’homale a considéré que le délai d'une journée entre l'entretien préalable et la signature de la rupture conventionnelle, intervenue dans un cadre conflictuel manifeste (procédure disciplinaire), n'était pas compatible avec le temps nécessaire à la recherche d'une solution amiable.

La Cour de cassation censure cette argumentation et rappelle d’une part, que « l’existence d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture » (principes rappelé à plusieurs reprises, Cass soc., 23 mai 2013 n°12-13.865 et 15 janvier 2014 n°12-23.942). D’autre part, l’article L1237-12 du Code du travail  n’instaure pas un délai entre l’entretien au cours duquel les parties au contrat de travail conviennent de la rupture du contrat et la signature de la convention de rupture, un délai d’une journée est admissible. La Cour de cassation avait déjà été amenée à poser cette solution (Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-19.268).

Ces deux principes trouvent toutefois leur limite dans l’existence d’un vice du consentement. Si le salarié démontre avoir subi des pressions ou une contrainte particulière de la part de l’employeur afin de l’inciter à signer, la validité de la convention de rupture sera évidemment remise en cause. La Cour de cassation a renvoyé les parties devant une autre cour d’appel qui devra se prononcer sur ce point.

Dans la seconde espèce (n°13-21.207), une salariée reprochait à l’employeur de ne pas l’avoir informée de la possibilité de se faire assister lors de l’entretien de négociation de la convention de rupture. Compte tenu de l’article L1237-12 du Code du travail qui permet au salarié d’être accompagné d’une personne de son choix appartenant au personnel d’entreprise ou d’un conseiller extérieur inscrit sur une liste dressée par l’autorité administrative, la salariée conteste la validité de la rupture conventionnelle.

La Cour de cassation censure cette argumentation et rappelle que le défaut d’information du salarié, sur la possibilité de se faire assister lors de l’entretien au cours duquel les parties au contrat de travail conviennent de la rupture, « n’a pas pour effet d’entraîner la nullité de la convention de rupture en dehors des conditions de droit commun ». La Cour de cassation réaffirme le principe selon lequel le défaut d’information n’est pas de nature à remettre en cause la convention de rupture en l’absence de démonstration d’un vice du consentement en résultat (Cass. soc., 29 janvier 2014, n° 12-27.594).

Pour confirmer le rejet de la demande de la salariée, la juridiction prud’homale a relevé qu’en l’espèce, l’initiative de la rupture conventionnelle appartenait à la salariée dans le but de créer une entreprise. Dès lors, l’absence d’information sur la possibilité de se faire assister lors de l’entretien au cours duquel les parties au contrat de travail ont convenu de la rupture du contrat n’avait pas affecté la liberté de son consentement.
 
Rappelons que l’existence d’un vice du consentement relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. Le fait que le salarié soit à l’initiative du recours à la rupture conventionnelle et que celle-ci ait pour objet de lui permettre de poursuivre un projet personnel, constitue manifestement un indice d’un consentement libre et éclairé.

Pour plus de précisions sur la rupture conventionnelle, vous pouvez consulter notre fiche pratique y afférente (voir lien ci-contre).
 

Vous avez une question d’ordre juridique ?
Questionnez nos experts spécialisés
Poser une question